LA PLAINE DE CÉSAR

« J’ai repensé à elle l’année où le photographe s’est installé au-dessus de l’ancienne épicerie.
Il est venu plusieurs fois, il restait deux ou trois semaines, marchait loin dans les terres jusqu’à ce que sa silhouette se fonde dans l’horizon. Nous nous demandions ce qu’il cherchait. Il photographiait les routes, les champs, les hangars de cette région qu’on appelait la plaine de César au temps d’Astérix. Il sortait tous les jours, même quand il y avait du brouillard.

Au début, nous ne lui parlions pas. Certains ne lui disaient même pas bonjour. Puis nous nous sommes habitués. Il avait pris ses habitudes, voulait connaître les nôtres. Il nous demandait à quoi nous occupions nos journées, comment nous vivions, comment nous aurions aimé vivre. Un jour, il est passé dans la serre et nous avons partagé une bière.

Je lui ai raconté pourquoi je ne voulais pas reprendre la ferme après mon père, il m’a demandé de lui parler de mes rêves ou au moins de mes projets. C’est un regret qui est sorti, un que j’avais depuis le départ de Lucille. »

GUILLAUME JAN

Photographies réalisées dans le cadre d’une résidence organisée par le PETR du grand Beauvaisis.
Ce travail a fait l’objet d’un livre édité par les Éditions Sur la Crête.